Nos services
Les jeunes sont loin d'être épargnés par les conduites suicidaires, avec au moins 40 000 d'entre eux qui tentent de se donner la mort chaque année. Si malheureusement environ une quarantaine décèdent par suicide chez les moins de 15 ans et 600 dans la tranche des 15-25 ans, ce chiffre est probablement encore sous-estimé. Est-il possible de détecter une conduite suicidaire en amont afin d'empêcher le pire ?
Une conduite suicidaire regroupe à la fois la tentative de suicide, et donc le passage à l'acte par un geste intentionnel (prise de médicaments, pendaison, phlébotomie, saut depuis un promontoire, ou utilisation d'une arme à feu par exemple), mais aussi les idées suicidaires en elles-mêmes, c'est-à-dire l'intention de se donner la mort. Que cette élaboration mentale soit active ou passive, plus ou moins précise, exprimée ou non, elle doit être prise au sérieux et faire considérer le jeune comme potentiellement suicidaire.
Dans cette tranche d'âge, si le suicide concerne plus particulièrement les garçons (avec 22 tentatives pour un suicide), la tentative de suicide concerne en majorité les filles (dans 75 % des cas, avec 160 tentatives pour un suicide), en majorité par l'utilisation des médicaments (intoxication médicamenteuse volontaire), plus ou moins associée avec d'autres substances comme l'alcool ou les drogues.
Chez les adolescents de 15 à 19 ans, environ 5 à 7 % des garçons et 11 à 13 % des filles reconnaissent avoir eu des idées suicidaires au cours de l'année précédente.
En plus des signes communs aux adultes, comme par exemple la tristesse, le repli sur soi, ou l'irritabilité, on retrouve aussi fréquemment des questions existentielles sur sa propre identité, son orientation sexuelle, un manque de confiance en soi, et l'apparition de conduites à risque comme la consommation de drogues ou d'alcool, le repli dans les jeux vidéo, ou les fugues à répétition.
Un changement de comportement, de style vestimentaire, une fascination pour le morbide, ou une baisse des résultats scolaires doivent alerter l'entourage et ne pas être banalisés. Si beaucoup de jeunes ont du mal à verbaliser leurs idées suicidaires, c'est souvent à travers leur comportement qu'ils alertent à leur façon.
Il est donc important de ne pas banaliser ou stigmatiser sous prétexte d'une problématique crise d'adolescence, mais de prendre au sérieux ce type de comportement, quel que soit l'âge auquel il survient. S'il ne mènera heureusement pas forcément à un passage à l'acte, il doit alerter sur la souffrance du jeune et éventuellement nécessiter une prise en charge psychologique.
On sait qu'il y a plusieurs facteurs de risque en lien avec la famille qui peuvent perturber les jeunes et augmenter le risque de conduite suicidaire chez certains d'entre eux. Il s'agit par exemple de perturbations dans la relation avec les parents, de violences conjugales, de séparation ou de divorce dans lequel le jeune joue le rôle de témoin, ou encore certaines situations où l'enfant devient le partenaire ou le thérapeute de son parent.
De façon générale, toutes les formes de violences (enfants battus, inceste…), de traumatisme ou de carence affective peuvent augmenter le risque de passage à l'acte suicidaire. On sait aussi que les antécédents familiaux de suicide, ou de dépression chez les parents peuvent être un facteur de risque.
Chez certains enfants, c'est l'absence de représentation de la mort en elle-même qui peut poser problème, ou bien une fragilité perturbant l'estime de soi comme la dépression ou un trouble de personnalité par exemple.
Que l'on soit parent ou amis, savoir reconnaître les signes d'une crise suicidaire permet d'alerter sans tarder les professionnels de santé et éventuellement prévenir le passage à l'acte potentiellement létal :
Ce qui doit alerter c'est surtout un changement de comportement assez brutal par rapport à ce que pouvait être le jeune jusqu'à présent.
Tout idée ou verbalisation suicidaire représente une souffrance psychologique qui n’est jamais anodine. Elle doit donc être prise au sérieux et nécessite une consultation auprès du médecin traitant, d'un psychologue ou d'un pédopsychiatre pour évaluer l'état psychologique global.
Dans certains cas, une hospitalisation de quelques jours à plusieurs semaines peut être nécessaire dans un service de pédiatrie ou de psychiatrie pour mettre une certaine distance avec l'environnement habituel et pouvoir amorcer un travail d'introspection. On peut aussi proposer des thérapies familiales si nécessaire et mettre en place un traitement antidépresseur si la conduite suicidaire reflète une véritable dépression.
- Fil Santés Jeunes : 08 00 23 52 36 ou 01 44 93 30 74 (Service anonyme et gratuit ou depuis un portable tous les jours de 9h à 23h)
- Association PHARE : 01 43 46 00 62 (Association de prévention du mal-être et du suicide des jeunes)
Auteur : Dr Claire LEWANDOWSKI (psychiatre - addictologue)
Retrouvez ici les réponses aux questions que vous pourriez vous poser