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Contrairement aux recommandations actuelles, la grossesse a longtemps été perçue comme un facteur de risque de récidive de cancer du sein. Ainsi, les données disponibles sous estiment les taux de grossesse obtenus puisque les pratiques sont actuellement différentes.
Selon les études (1,2), les taux de grossesse varient de 5 % à près de 40 % en fonction de la population de référence avec des taux de naissance vivante de l’ordre de 50 à 60 %. Les taux d’interruptions volontaires de grossesse étaient majorés dans les 2 ans, ce qui souligne l’importance d’informer les patientes sur l’état des connaissances actuelles concernant la grossesse après cancer du sein.
La toxicité des traitements est évaluée par le taux d’aménorrhées chimio-induites. Ce taux est dépendant de l’âge au diagnostic, de la réserve ovarienne de la patiente ainsi que du type et des doses de chimiothérapie délivrées.
Chez les femmes de moins de 35 ans, l’aménorrhée transitoire est fréquente et dure en moyenne 6 à 12 mois, le temps que les follicules ovariens « abimés » soient remplacés par de nouveaux follicules. Ceci étant pour retrouver un cycle « normal », il faut jusqu’à 24 mois.
Avec le protocole FEC (1ère partie du traitement de chimiothérapie du cancer du sein), 10 à 25 % des patientes âgées de moins de 40 ans sont ménopausées contre 90 % après 40 ans. Il existe des traitements (agonistes de la LHRH) qui permettent de préserver les follicules dont la croissance est déjà initiée, au sein d’une population bien sélectionnée (3).
Concernant la tamoxifène, les effets sont peu connus. Son impact sur la survenue d’une ménopause précoce est débattu mais serait mineur chez les patientes jeunes (3).
Lors du diagnostic de cancer, chez certaines patientes bien sélectionnées, il se discutera une préservation de la fertilité. Plusieurs techniques existent. En cas de tumeurs hormono-dépendantes, la stimulation ovarienne est à éviter. D’autres techniques sont possibles, évitant la stimulation.
Le délai habituel de conception est de 6 mois. Passé ce délai, il est donc recommandé de consulter un service de procréation médicale assistée.
Les oestrogènes jouent un rôle clé lors du développement du cancer. Ainsi, il a, pendant des années, été déconseillé d’envisager une grossesse après un cancer du sein.
Les études récentes vont à l’encontre de cette croyance.
Une analyse portant sur 14 études (3) a montré que les patientes ayant obtenu une grossesse après leur cancer du sein avaient une diminution de 41 % du risque de décès par rapport à celles n’ayant pas obtenu de grossesse, et ce quel que soit le statut hormonal. Cet effet, appelé « healthy mother effect » a permis d’inverser les recommandations et de rassurer les patientes sur l’absence de lien entre grossesse et récidive de cancer du sein.
Concernant la chimiothérapie, les études (4) n’ont pas mis en évidence de différence en termes de malformations, prématurité ou de retards de croissance. Il est tout de même recommandé d’attendre 6 mois au moins avant la conception.
Le tamoxifène est à l’origine de malformations congénitales s’il est pris pendant la grossesse(3). Il est donc recommandé d’attendre 3 à 6 mois après la fin du traitement, avant la conception.
Il n’y a à priori pas de foetotoxicité du trastuzumab si un délai de 3 mois est respecté avant la conception.
Après un cancer du sein, chez les patientes non hormono-dépendantes (RH -), la majorité des rechutes survient dans les 5 premières années. A l’inverse, pour les patientes RH +, la moitié des rechutes survient après 5 ans. Dans ce dernier cas, une hormonothérapie par tamoxifène est donnée pour une durée minimal de 5 ans voir 10 ans en cas d’atteinte ganglionnaire initiale.
Pour les patientes RH -, le délai recommandé est généralement de 2 ans.
Pour les patientes RH +, il est possible d’interrompre l’hormonothérapie au bout de 2 ans en vue d’une grossesse puis de terminer le traitement au décours de l’accouchement.
En l’absence d’hormonothérapie et chez les patientes de bon pronostic, il convient d’attendre au moins 6 mois avant la conception.
Le projet de grossesse et les modalités d’obtention de la grossesse devront donc être abordés en consultation avec toute l’équipe médicale.
La grossesse après cancer du sein ne doit donc pas être découragée. Elle doit être accompagnée.
Dr Victoire Molinier
Références bibliographiques
1: Azim HA Jr, et al. Safety of pregnancy following breast cancer diagnosis : a meta analysis of 14 studies. Eur J Cancer 2011.
2: Partridge AH, et al. Fertility and menopausal outcomes in young breast cancer survivors. Clin Breast Cancer 2008.
3: Pagani O, et al. Pregnancy after breast cancer: if you wish, ma’am. Breast Cancer ResTreat 2011.
4 : Langagergaard V, et al. Birth outcome in women with breast cancer. Br J Cancer 2006.
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